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La villa de « Roullée » à Mont-Saint-Jean (Sarthe) Version imprimable

Rapports des opérations et présentation générale du site archéologique.

Rapports des opérations archéologiques (à télécharger)

Rapport 2011

(PDF / 21 Mo)
Rapport 2010

(PDF / 17,4 Mo)
Rapport 2009

(PDF / 57,8 Mo)
  

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Localisation

L’établissement rural gallo-romain de Roullée se situe à 600 m au nord de la forêt domaniale de Sillé-le-Guillaume, sur la commune de Mont-Saint-Jean, dans le nord-ouest du département de la Sarthe.


 Localisation de Mont-Saint-Jean

Une découverte ancienne

En 1844, le vicomte de Dreux-Brézé fait opérer le dégagement de substructions visibles dans un pré proche de la ferme de Roullée (Mont-Saint-Jean, Sarthe), dont il est propriétaire. Rapidement est mis au jour un bâtiment maçonné d’époque romaine pourvu d’une mosaïque à décors marins – la seule mosaïque figurée connue dans les campagnes cénomanes –, de sols de béton, d’enduits peints et de tubuli (conduits muraux servant à la circulation d’air chaud). Ces éléments laissent supposer qu’il s’agit d’un balnéaire (thermes privés), probablement associé à une opulente résidence rurale. Le site de Roullée a été interprété, dès sa découverte, comme une villa malgré l’absence d’autres bâtiments, notamment d’annexes en lien avec les productions agricoles (pars rustica).

 
Relevé de la Mosaïque d’après Drouet C., Hucher E. 1856  
 

52 squelettes ont été exhumés des ruines par les ouvriers du vicomte. Ces sépultures, interprétées à tort comme les restes des victimes d’un massacre lié aux invasions barbares lors de leur découverte, révèlent la réoccupation funéraire du bâtiment romain durant les premiers temps du Moyen Âge. Malheureusement, la totalité du matériel archéologique recueilli lors de cette première fouille a été perdue. De même, la mosaïque, restée sur place après sa mise au jour, a été détruite par les intempéries et peut-être aussi par les récupérations.

En 1873, la découverte d’une statuette en calcaire représentant une divinité masculine – la seule sculpture antique en rond de bosse découverte en milieu rural dans le département de la Sarthe – à proximité de la ferme de Roullée renforce l’aspect exceptionnel du site.


Statuette découverte à Roullée en 1874 d’après Bouvet 2001 : 367

L’image donnée par les découvertes anciennes est très lacunaire mais suggestive. En effet, on ne connaît qu’une partie du plan du balnéaire, non localisé et non orienté. Toutefois, il apparaît plus que probable que le bâtiment dégagé en 1844 ne soit qu’une partie d’un ensemble plus vaste et particulièrement opulent dont l’extension, la chronologie comme la fonction restent à déterminer.

 

Plan des vestiges dégagés en 1844 d’après Drouet C., Hucher E. 1856

Problématique

Les recherches menées depuis 2004 ont permis de mettre en évidence une importante zone de production sidérurgique antique, centrée sur la partie orientale de la forêt domaniale de Sillé-le-Guillaume et dont les principaux ateliers entourent le site de Roullée.

Ce dernier site demeure à ce jour l’un des rares habitats antiques connus dans ce secteur. Il se trouve, en effet, dans une zone de vide de la carte archéologique pour laquelle l’essentiel de la documentation est antérieur à la première guerre mondiale. La présence d’une riche résidence rurale dans ce contexte métallurgique pose la question des liens qu’elle pouvait entretenir avec l’activité sidérurgique proche. C’est dans cette perspective qu’ont été reprises les recherches sur le site de Roullée. Ce projet a pour but de :
 
 1 - définir la chronologie du site ;
 2 - délimiter son extension ;
 3 - déterminer l’état de conservation ;
 4 - acquérir des données pour établir sa fonction ; et de mieux appréhender l’environnement naturel et archéologique du site.

Résultats des campagnes 2009-2011

 
 Prospection magnétique par la société Géocarta / Résultat de la prospection et implantation des sondages 2009

En préalable à la fouille a été menée une prospection géophysique (électrique et magnétique) sur 1,7 ha de pré de part et d’autre du ruisseau de Roullée, en aval de la ferme du même nom. La prospection géophysique a permis de cerner le passage d’un paléochenal et trois ensembles d’anomalies, interprétés comme des bâtiments, numérotés de 1 à 3 du nord au sud. Le bâtiment 3 a été identifié, en raison de ses dimensions, à celui dégagé au XIXe s. et jusqu’ici non localisé. Trois campagnes de fouilles ont été menées de 2009 à 2011. Elles ont donné lieu à l’ouverture de 23 sondages concernant principalement les bâtiments inédits, 1 et 2.

 
 Plan général des structures connues de la villa antique (2011).

Ces opérations permettent de dresser un tableau du site de Roullée bien différent de celui connu jusqu’ici par les découvertes anciennes. L’établissement rural s’étend sur au moins 1,5 ha et comprend au minimum cinq bâtiments disposés en deux ailes formant un angle droit. Dans la partie nord, les édifices 1 et 2 repérés grâce à la prospection géophysique ont été intégralement fouillés. Il s’agit de bâtiments en matériaux périssables (parois à pans de bois et couverture végétale) dont seules les fondations et quelques lambeaux de sol nous sont parvenus. Ils différent sensiblement dans leur mode de construction mais aussi dans leur fonction. Le premier semble avoir eu, dès son origine, une double fonction d’habitat (céramique de stockage, de cuisson et vaisselle de présentation) et de production (fragments de meules, scories de forge et four de potier). Le second adopte dans son état final le plan standardisé de granges plurifonctionnelles reconnues à des dizaines d’exemplaires dans les campagnes de Gaule romaine.


Vue du bâtiment 2 dégagé dans son intégralité (2011)

La présence de plusieurs dizaines de kilogrammes de scories de forge démontre la réalisation d’activités métallurgiques sur le site. Les examens métallographiques menés sur une douzaine de spécimens attestent de tâches variées allant de l’épuration à la fabrication de petits objets en passant par le traitement de pièces métalliques massives. Malheureusement, ces déchets ont été mis au jour dans des niveaux de remblai et les structures de la forge restent à découvrir.

La sidérurgie n’est pas la seule activité de production pratiquée sur le site. Un four de potier, très mal conservé, indique une production potière limitée attribuable au IIIe s. La découverte de meules de grand diamètre est l’un des éléments les plus intéressants. En effet, leur taille induit l’utilisation de la force animale ou hydraulique. La présence du ruisseau de Roullée à moins de 40 m invite à privilégier la seconde possibilité. L’hypothèse de l’existence d’un moulin hydraulique associé à la villa reste à prouver mais semble néanmoins une piste sérieuse.

Au sud, le bâtiment 3 dégagé en 1844 a été sondé sur une petite surface en 2011. Il s’avère que, contrairement à l’hypothèse communément admise, il ne s’agit pas d’un balnéaire, en tout cas pas dans son dernier état d’occupation. En outre, il n’est pas isolé mais se rattache à l’ensemble de constructions maçonnées qui barre la vallée sur une longueur d’environ 70 m de part et d’autre du cours actuel du ruisseau de Roullée. Des tranchées de reconnaissance ont ainsi permis de reconnaître l’existence de murs maçonnés antiques dans la parcelle située en contre-bas de la maison de La Selle. Le plan exact de cette opulente résidence (enduits muraux, sol de béton, stuc, mosaïque) n’est pas encore établi. Il constituera un des enjeux des prochains programmes de fouille.


Vue de l’abside de la salle à la mosaïque du bâtiment 3 perçu dans une tranchée menée en 2011.

Les structures repérées jusqu’à présent ne constituent sûrement qu’une portion d’un établissement beaucoup plus vaste, assimilable à la catégorie des villae à pavillons multiples alignés reconnue dans plusieurs régions du centre et de l’est des Gaules et dans les provinces de Germanie.

Les traces d’occupations anthropiques les plus anciennes remontent au Néolithique moyen (une douzaine de silex). Toutefois, l’établissement antique semble être créé ex nihilo vers le milieu du Ier s. de n. è. (peut-être dans les années 40). Les bâtiments subissent des modifications nombreuses et parfois importantes. Ainsi, six états de construction ont pu être mis en évidence pour l’édifice 2 et au moins trois pour le bâtiment 3. La partie résidentielle semble être abandonnée vers la fin du IIIe s. Des sépultures sont installées dans ses ruines à partir du Ve s. et probablement jusqu’à la fin du VIIe s. En revanche, les bâtiments de la cour des communs (1 et 2) sont occupés jusqu’au IVe s. au moins pour le premier et jusqu’au Xe s. pour le second. Ainsi, si la fonction et l’organisation du site changent, son occupation perdure sur près de dix siècles.

Références

Bouvet J.-P. 2001 : La Sarthe, coll. CAG, Académie des Inscriptions et Belles Lettres, Paris, MSH, 518 p.

Drouet C., Hucher E. 1856 : Notice sur la mosaïque de Roullé, à Mont-Saint-Jean (Sarthe), in : Hucher E. (dir.) - Études sur l’histoire et les monuments du département de la Sarthe, Le Mans : Monnoyer ; Paris : Didron, Dumoulin ; Oxford : Parker (rééd. 1896) : 239-243. 

Voir aussi :

> Rubrique consacrées aux fouilles archéologiques à la Villa de Roullée à Mont-Saint-Jean (et modalités de participation), plus d'infos >>